Les travaux d’entretien courant du domicile en regard de la CNESST (art. 165 LATMP)
(le masculin est utilisé afin d’alléger le texte seulement)
Le travailleur atteint d’une atteinte permanente grave à son intégrité physique peut obtenir le remboursement des frais qu’il engage pour l’entretien courant de son domicile. Il s’agit d’une mesure de réadaptation sociale prévue par la Loi sur les accidents du travail et maladies professionnelles (LATMP). Elle permet à un travailleur de maintenir son domicile en état afin de couvrir plusieurs travaux d’entretien récurrents comme le gazon, le déneigement, la peinture, le grand ménage. Cet article couvre en détail ce qui est remboursable par la CNESST et la procédure pour l’obtenir.
Loi :
165. Le travailleur qui a subi une atteinte permanente grave à son intégrité physique en raison d’une lésion professionnelle et qui est incapable d’effectuer les travaux d’entretien courant de son domicile qu’il effectuerait normalement lui-même si ce n’était de sa lésion peut être remboursé des frais qu’il engage pour faire exécuter ces travaux, jusqu’à concurrence de 1 500 $ par année.
1985, c. 6, a. 165.
Admissibilité :
Il y a 4 conditions à remplir :
- Une atteinte permanente grave. Contrairement à ce que l’article laisse penser, il ne faut pas nécessairement un haut pourcentage d’atteinte permanente selon le barème des dommages corporels (DAP). Les tribunaux ont à de maintes reprises reconnues qu’il faut comprendre l’atteinte permanente grave selon les limitations fonctionnelles ET le pourcentage d’atteinte permanente par rapport à la capacité résiduelle de faire les travaux d’entretien courant.
- Il doit s’agir de votre domicile, c’est-à-dire votre résidence principale incluant les commodités et lieux attenants (terrain, clôture, cabanon et le garage). Il n’est pas nécessaire d’être propriétaire, vous pouvez être locataire, mais démontrer que cela relève de votre responsabilité.
- Incapacité à refaire ces travaux, qu’il effectuerait lui-même, n’eût été la lésion professionnelle. Par exemple, si avant l’accident, le travailleur n’effectuait aucune tâche de déneigement ou de peinture avant la lésion professionnelle, il ne faut pas s’attendre à ce que la CNESST accepte la demande.
- Vous devez avoir engagé les frais ( la CNESST rembourse, mais ne fait pas d’avance.).
Qu’est-ce qui est remboursable ?
Le législateur n’a pas défini ce qu’étaient les « travaux d’entretien courant » du domicile. Cependant, les tribunaux ont clairement établi le principe soit :
Il faut comprendre qu’il s’agit des travaux d’entretien habituels, ordinaires du domicile, par opposition à des travaux d’entretien inhabituels ou extraordinaires.
Par ailleurs, ceci ne veut pas dire que de tels travaux doivent être effectués toutes les semaines ou à tous les mois. L’important est que ces travaux soient habituels et ordinaires sans qu’il soit nécessaire d’établir qu’ils reviennent à une fréquence importante.
On vise ici la résidence principale du travailleur, ce qui peut inclure les commodités et les lieux afférents à cette résidence (terrain, clôture, cabanon, garage).
Par ailleurs, si vous êtes propriétaire d’un multilogement, maison multigénérationnelle, un condo, seule la partie que vous habitez personnellement est autorisée pour le remboursement.
Donc, voici les travaux les plus souvent demandés et acceptés :
- L’entretien de la pelouse (tonte du gazon) / certains travaux visant à la conservation d’un terrain et du domicile d’un travailleur tel le taillage des arbres et arbustes (haies) et les couper si nécessaire, ainsi que ramasser des feuilles dans les gouttières et sur le terrain ;
- Le déneigement et le déglaçage d’une aire de stationnement du domicile et de ses dépendances immobiles, telles qu’un balcon, patio, galerie, toiture (toit) qui doivent être nettoyés pour conserver et utiliser ces espaces nécessaires à l’entretien courant du domicile. On peut également inclure l’installation d’un abri temporaire (style « Tempo ») ;
- Le grand ménage intérieur (lavage des murs, plafond, tapis, vitres, armoires, etc.) ;
- La peinture (5 ans intérieur, 2 ans extérieur).
- L’application de scellant sur un pavé d’entrée pour éviter la dégradation.
- Le bois de chauffage (des conditions s’appliquent, notamment, il doit s’agir du mode de chauffage principal (quant au remboursement pour le chauffage d’appoint (auxiliaire) au bois, une controverse existe au niveau du tribunal, mais il peut être remboursé selon plusieurs décisions du tribunal) / ramonage de la cheminée.
- L’entretien ménager hebdomadaire (lavage des planchers, toilettes, époussetage, lavage salle de bain, etc…) (même si généralement on le considère dans la section de l’aide personnelle, il y a un courant jurisprudentiel acceptant ces frais considérant qu’ils sont généralement nécessaires au maintien du domicile) (note : n’oubliez pas qu’il faut prendre en compte le maximum permis annuel pour les travaux d’entretien courants). Malgré le courant majoritaire du tribunal, la CNESST accepte rarement ces tâches comme entrant dans cette section de la loi.
De plus, il n’y a que la main-d’œuvre qui soit remboursée. Par exemple, le coût de la peinture n’est pas remboursable.
Cette liste n’est pas exhaustive, il existe d’autres travaux remboursables, il s’agit dans tous les cas de respecter les critères généraux de l’article 165 LATMP.
Autres travaux qui ont été répertoriés comme étant acceptables :
- le sablage et le vernissage d’un plancher de bois franc qui visent à le restaurer et à le conserver, c’est-à-dire à l’entretenir ; (il s’agit d’une tendance majoritaire actuellement, mais longtemps sujette à controverse)
Travaux n’étant pas considérés comme « Entretien courant du domicile » (cette liste n’est pas limitative)
- Installation / réparation de chauffe-eau ;
- La peinture dans le cadre d’un déménagement ;
- Des travaux de solidification des fondations d’une résidence ne sont pas des travaux d’entretien courant, mais des travaux inhabituels ;
- Le remplacement de la tuyauterie d’une cheminée installée depuis 22 ans est une réfection majeure inhabituelle ;
- Les travaux de réfection (remplacement) des planchers de bois ;
- Le remplacement des portes et fenêtres d’une maison est une réfection majeure inhabituelle ;
- La construction d’une galerie ;
- Remplacement (réfection) d’une toiture d’une maison ne sont pas des travaux d’entretien courant du domicile en raison de leur caractère inhabituel;
- La modification d’un système de chauffage, soit le remplacement d’une « fournaise au bois » par un système de type « biénergie », est une réfection majeure inhabituelle ;
- L’installation d’une nouvelle clôture ;
- La réparation d’un solage en raison d’une infiltration d’eau ;
- Les travaux d’abattage d’arbres (incluant émondage, essouchage d’arbre) d’excavation et d’aménagement paysager.
Quel est le maximum remboursable ?
Pour l’année 2024, le maximum est de 3897 $, ce montant est revalorisé (indexé) chaque année. La loi ne prévoit pas de report sur les années subséquentes pour les montants non utilisés. Autrement dit, les montants non utilisés dans une année ne peuvent être reportés sur la suivante.
(2023 = 3733$, 2022 = 3505$, 2021 = 3413$, 2020 = 3379$, 2019 = 3316$, 2018 = 3241 $, 2017 = 3193 $, 2016 = 3149 $, 2015 = 3112 $, 2014 = 3057 $)
Cependant, lorsque des montants ont été engagés pour ces frais AVANT la détermination de l’atteinte permanente (et limitations fonctionnelles), la CNESST reconnaît régulièrement le paiement des années rétroactives considérant qu’il n’était pas possible de déterminer la permanence des atteintes subies.
Quand faire la demande ?
Dans les faits, la CNESST va analyser la demande lorsque les limitations fonctionnelles finales seront déterminées et retenues par la Commission. Plus spécifiquement, soit lorsque la CNESST reconnaît le Rapport d’évaluation médicale (REM) de votre médecin qui a charge (médecin traitant) ou à la fin de la procédure d’évaluation médicale (ie : si votre médecin qui a charge entérine les conclusions de l’expert de l’employeur ou de la CNESST dans un rapport complémentaire) ou suite à l’avis du membre du Bureau d’évaluation médicale (BEM)).
Vous pouvez également faire la demande dès le début de votre lésion. Cependant, la CNESST risque fortement de refuser votre demande. Notre conseil : conservez vos reçus ORIGINAUX et les soumettre dès qu’on vous confirmera médicalement que votre lésion entraînera des séquelles permanentes vous empêchant de faire vos entretiens de domicile.
Procédure pour la demande :
Vous contactez votre conseiller en réadaptation et vous lui en faites la demande.
Dans certains dossiers, la CNESST demande à visiter le domicile avant d’octroyer les travaux.
Ensuite, le travailleur doit obtenir deux soumissions pour chaque entretien qu’il désire obtenir. Ce dernier critère n’est pas absolu, car les travailleurs résidants en dehors des grands centres ont souvent de la difficulté à obtenir deux soumissions écrites d’entrepreneurs. Certaines CNESST ne demandent pas deux soumissions si le montant est inférieur à un seuil défini. Par exemple, les travaux de moins de 300 $.
Il est judicieux d’attendre l’autorisation de la CNESST (appel de l’agent ou décision écrite) avant d’engendrer les frais.
Il est conseillé de choisir des entrepreneurs avec émission de facture (comprendre avec numéro de taxes). Nous ne recommandons pas le « conjoint », « beau-frère » ou le « voisin » avec des reçus fait à la main sur le « bord de la table ». Néanmoins, cela est toutefois possible en fournissant les coordonnées de la personne fournissant le service d’entretien en question.
On recommande de vérifier vos reçus afin qu’il comporte la date, les coordonnées complètes de l’entrepreneur / ouvrier, les numéros de taxes et/ou NEQ avec un descriptif des travaux effectués et la mention que les travaux ont été payés. Certaines CNESST demandent les reçus ou factures originales. Donc, transmettre le tout par la poste.
Vous devriez ensuite recevoir votre paiement quelques semaines plus tard.
Nous savons que la plupart des CNESST régionales ne demandent pas de nouvelles soumissions pour les années subséquentes pour les travaux récurrents annuels (déneigement/gazon) lorsqu’ils sont effectués par le même entrepreneur et que l’augmentation annuelle ne dépasse pas un certain pourcentage.
Si ma situation change, puis-je faire réévaluer mes besoins?
Plusieurs situations peuvent permettre une réévaluation des besoins de travaux d’entretien courant du domicile:
- Une détérioration de l’état de santé qui doit se traduire par une nouvelle lésion professionnelle. (Par exemple, une nouvelle récidive, rechute ou aggravation (RRA) ou encore un nouvel événement (accident ou maladie professionnelle) qui résulte à de nouvelles limitations fonctionnelles et atteintes permanentes;
- le proche qui accomplissait les travaux n’est plus disponible. Par exemple, suite à une maladie, séparation ou décès;
- un nouveau composant s’ajoute au domicile;
- un déménagement dans un nouveau domicile.
Sources pertinentes:
Les travaux d’entretien courant – Site CNESST